Louis Panier, Le Péché originel

Naissance de l'homme sauvé. Paris, Éd. du Cerf, Collection " Théologies ", 1996, 150 p

 

Hinweis: Diese Rezension übernehmen wir mit freundlicher Genehmigung aus der Revue de droit canonique (Strasbourg).

 

Le livre de Louis Panier scande heureusement la série d'ouvrages qui consacrent le renouveau théologique français. Se démarquant d'une théologie réduite à répéter l'histoire de son histoire, celle de ses significations, de ses traditions, de ses récolements de sens, cette nouvelle théologie trouve, ou retrouve, le chemin qu'elle n'aurait jamais dû abandonner et qui consiste à écrire les conditions mêmes de son élaboration.

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Louis Panier, comme Paul Beauchamp, François Martin, Jean Ansaldi, Jacques Joubert, René Heyer, et j'en passe, prend acte de ce qu'il nomme le défi de la " philosophie moderne " marquée par le retour du sujet. Cette théologie, qu'on pourrait appeler " théologie du bord ", résulte d'un rigoureux travail de lecture, qui sait respecter les textes conciliaires, pontificaux, patristiques ou bibliques et les analyser à partir des catégories développées par la sémiotique littéraire ou la psychanalyse.

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Après Jean Delorme ou Jean Calloud, Panier honore la tradition du Cadir, tradition vivante qui refuse de se laisser enfermer dans des procédures figées et ne réduit pas sa lecture à l'application de schèmes définitifs.

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Soucieux de rendre au concept du péché originel une signifiance qu'un " traditionalisme dépassé " avait étouffée, Panier nous fait découvrir, à travers sa lecture de textes choisis (Profession de foi de Paul VI, Gaudium et spes de Vatican II, Enchiridion de s. Augustin, chapitres 2 et 3 de la Genèse et chapitre 5 de l'Épître aux Romains) ce qu'il nomme " la structure profonde du sujet ". Le terme de structure (de l'humain, de l'humanité, du sujet) ponctue l'itinéraire de l'auteur, amené en fin de parcours à poser la " question du sujet " (nous soulignons).

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Le travail de Panier ne vise pas, bien sûr, à restaurer quelque substantialisme du sujet, mais à pointer dans l'écriture de chacun des textes étudiés les conditions de l'avènement de celui-là. Le péché originel apparaît ainsi comme l'écriture après coup, après l'événement christique, d'un commencement où la figure d'Adam représente les effets du nouement de la chair et de la parole. La saisie de ce nouement pourtant échappe en tant que telle, et c'est pourquoi le péché originel garde une dimension impossible, renvoyant finalement à l'acte du dire qui ne cesse de décompléter tout énoncé en même temps qu'il en offre les conditions de possibilité.

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Panier, heureusement, ne conclut pas. Il trace, en fin de parcours, des " perspectives " qui laissent penser que le péché originel, comme le salut christique, relève d'une écriture après coup de l'événement en tant que tel, événement qui détermine le procès de " véri-fication " en quoi consiste la théologie.

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Roland Sublon