Jean-Luc Hiebel et Luc Perrin, dir., Louis Bautain, l'abbé-philosophe de Strasbourg (1796-1867)

Strasbourg, ERCAL Publications, 1999, 201 p.

 

Hinweis: Diese Rezension übernehmen wir mit freundlicher Genehmigung aus der Revue de droit canonique (Strasbourg).

 

En mai 1997, l'ERCAL (Équipe de recherche sur le catholicisme en Alsace-Lorraine, Université Marc Bloch de Strasbourg) avait réuni pour un colloque philosophes, théologiens et historiens, afin de célébrer le bicentenaire de la naissance de Louis Bautain. Les contributions, d'un grand intérêt, ont été réunies dans ce quatorzième volume de la collection. Certes, l'illustre ecclésiastique est surtout connu pour son engagement dans les mouvements intellectuels du xixe siècle, comme l'a rappelé M. le cardinal Paul Poupard, grand connaisseur de Bautain, auquel il avait consacré sa thèse et dont il a résumé l'œuvre intellectuelle sous le titre " Un essai de philosophie chrétienne au xixe siècle " (p. 53-68). Quatre autres conférenciers ont situé la pensée de Bautain par rapport aux courants philosophiques et théologiques de son temps : J. Grange (" L. Bautain : une réfutation traditionaliste de l'éclectisme "), E. Poulat (" Sur trois figures de philosophes chrétiens : Lamennais, Ventura, Bautain "), P. Gauthier (" La raison et la foi dans la philosophie de L. Bautain ") et M. Deneken (" Bautain, un théologien romantique français ? ").

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Mais " l'abbé-philosophe " était aussi un homme d'action et à ce titre son parcours est d'un grand intérêt pour l'histoire des institutions ecclésiastiques en France au xixe siècle. Bautain fut même pressenti pour le ministère épiscopal et la note rédigée à son sujet par un fonctionnaire du ministère des cultes, fin 1854, est éloquente : " M. Bautain, vicaire général, promoteur du diocèse de Paris. Son mérite est éminent et tout à fait hors ligne. Sa piété est exemplaire. Ses mœurs et ses habitudes sont pleines de gravité. M. Bautain serait une des gloires de l'épiscopat français. ". Malgré cet avis favorable, le ministre n'a pas inscrit l'abbé Bautain sur la liste des évêques, par diplomatie, pour ne pas soulever l'opposition des milieux intransigeants (p. 166-167).

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Les titres de la seconde partie du volume sont comme un inventaire des principales institutions mises en place ou rénovées après la Révolution française et dans lesquelles l'abbé Bautain s'était engagé de façon active : " Le Petit Séminaire Saint-Louis " (à Strasbourg), par L. Schlaefli, " Louis Bautain et Henri Maret à la Sorbonne ", par C.-E. Bressolette, " L'éducateur, et le fondateur de la Congrégation de Saint-Louis ", par B. O'Doherty, " Le Vicaire général de Paris ", par J.-O. Boudon, " L. Bautain, Mlle Humann et Théodore Ratisbonne ", par D. Gros. Ces multiples engagements ont suggéré à L. Perrin cette question : " L. Bautain, un autre Lamennais ? " Quant à leur vaste rayonnement, il a été mis en valeur par J.-L. Hiebel : " En Alsace, à Paris et dans le monde entier " (avec des illustrations).

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Cet ensemble d'études fait connaître de façon très concrète, par l'itinéraire singulier et les nombreuses initiatives de cet abbé-philosophe, les évolutions du catholicisme français au milieu du xixe siècle. On y découvre l'état du clergé en 1828 et la diversité des attentes, quant à sa formation, selon la ville et la campagne en Alsace (p. 117-118), la réorganisation du diocèse de Paris, avec ses conflits (p. 160), les tensions entre gallicans et ultramontains, l'adoption de la liturgie romaine à Paris en 1854 (p. 163), les relations entre catholiques et israélites (p. 175), etc. À la lecture de toutes ces pages, on comprend que son ami Maret ait rendu cet hommage à Louis Bautain : " Qu'il reste à jamais pour ses anciens collègues, qui furent ses amis et même ses disciples, un modèle, une force, un honneur ! " (p. 130).

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Marcel Metzger